Ce qui attire tout particulièrement les artistes à se lancer dans le street art, c'est le statut légal. Ou plutôt son acte considéré comme illicite, car jugé dégradant pour le mobilier urbain. C'est notamment ce qu'inclut la loi en France, mais aussi aux États-Unis, là où les premières œuvres d'art de rue sont nées, et considérées comme illicites. La marginalité alors du street art pour son aspect criminel est ce qui inspire bon nombre d'artistes. Mais aujourd'hui, les temps ont changé. En près de 60 années d'art urbain, les villes comme le ministère de la Culture en France en font la promotion, et rendent légal le street art, dans une moindre mesure. Nous aborderons également les droits d'auteur pour ces artistes illégaux, mais dont les œuvres sont parfois pillées, voire volées. Découvrez Yrcmag et entrez dans l'univers du Street Art.
Dès les premières œuvres créées dans les rues de Paris ou encore partout en France, dans un contexte non encadré, l'aspect criminel du street art commence à poser question. Et le gouvernement finit par trancher en stipulant que ces œuvres colorées par de la peinture ou des bombes aérosols sur les barres d'immeubles, quais du métro, ou même sous les ponts sont illégales. Le Code Pénal établi en 2002, puis connaissant une évolution en 2008, n'est pas tendre avec les artistes de street art, l'illicité de leurs œuvres étant prononcée. Un graffeur ou artiste urbain en France est ainsi passible d'une amende de l'ordre de 30 000€, dans la mesure où la dégradation et la détérioration d'un bien immobilier urbain sont constatées. Pour les simples œuvres légères de street art, le Code Pénal implique une amende réduite à 3 750€.
La loi appliquée le 15 juillet 2008 est beaucoup plus restrictive en France pour l'art urbain illégal. L'amende est réajustée à 45 000€, et surtout, c'est une peine de trois ans d'emprisonnement qui peut être retenue contre l'artiste de rue, l'illégalité incluant une forte dégradation du mobilier urbain et des frais de réparation impactant directement le budget des villes. Cette loi en France tend même à se durcir, les députés rassemblés au sein de l'Assemblée Nationale demandant une plus grande fermeté contre les artistes de rue qui dégradent de plus en plus les biens publics et qui continueraient à agir dans l'impunité la plus totale. L'aspect criminel pour le street art devrait être plus ferme, et surtout plus sévère, les premières mesures n'ayant pas permis de dissuader les graffeurs ou autres artistes, c'est même le contraire. Découvrez les meilleurs artistes urbains du moment.
Alors que la loi en France est claire concernant le côté illégal des oeuvres street art, ainsi que de leurs créateurs, avec des amendes plus importantes, et surtout des peines d'emprisonnement qui peuvent être retenues par les juges, il est un paradoxe particulier que pose de nombreux spécialistes. Les artistes urbains ont-ils des droits sur leurs œuvres, malgré l'illégalité du street art ? Pour que ce soit le cas, il faut que le créateur d'une œuvre volée ou pillée soit reconnu comme un artiste à part entière, et non comme un personnage en situation illicite vis-à-vis de la loi. C'est notamment ce qu'il s'est passé avec l'artiste Invader, proposant ses œuvres inspirées du jeu Space Invader, dans les rues de Paris, mais aussi partout en France. Plusieurs personnes se faisant passer pour des employés de mairie ont pu dérober les créations urbaines, en plein jour, sans que personne ne bouge. La ville n'étant pas propriétaire de l'œuvre, elle n'a pu déposer plainte que pour le motif d'usurpation d'identité. Pour l'artiste Invader, la légalité de son street art n'est définie qu'à la seule appréciation du juge en France. Si ce dernier vient à considérer qu'Invader est un artiste majeur, et que ces œuvres sont bien des œuvres, il a des droits sur ses créations, et peut ainsi demander réparation et des indemnités pour les œuvres détériorées ou volées.
Il est un autre exemple tout particulier que nous souhaitions vous développer, mais qui ne se passe pas en France, pour comprendre la législation dans le street art et les droits d'auteurs pouvant être retenus. 5Pointz est un endroit mythique pour tous les artistes urbains de New-York. Ce hangar désaffecté depuis les années 80, et détenu malgré tout par un promoteur immobilier, a été laissé en place pour ne devenir qu'un musée à ciel ouvert et tout public où les meilleurs artistes du monde entier, ainsi que new-yorkais, pouvaient exposer. « La Mecque du Graffiti » en 2013 n'est plus. Le promoteur, ayant déposé un recours auprès de la mairie pour la destruction de ce hangar et la construction de logements, n'a pas attendu l'obtention des documents administratifs, et en une nuit, l'endroit a été repeint en blanc. Le juge en charge du dossier n'a pas directement statué sur la destruction d'œuvres d'art, mais plutôt sur la réhabilitation d'un bien sans permis validé. L'affaire rendue publique en 2017 a par la suite pris une tournure à l'avantage des artistes de 5Pointz. Chaque fresque détériorée ou effacée a été considérée d'un point de vue légal pour le street art, sous le motif de la loi de 1990 : Visual Artists Rights Act (VARA). Ainsi, chacun des graffeurs ayant créé une œuvre au sein de 5Pointz a été dédommagé par le promoteur, condamné à une amende de plus de 5 millions d'euros.
À travers ces exemples prônant de plus en plus les droits d'auteur pour des artistes street art, et un statut légal de leurs œuvres en cas de vol ou de dégradation, nous tendons aujourd'hui à légaliser pleinement l'art de rue. Mais malgré tout, ces créations doivent rester dans un contexte sous autorisation. La ville de Strasbourg en 2018 a fait appel à de nombreux artistes de France et du monde pour redécorer l'ensemble de son mobilier urbain, et rendre ainsi le centre beaucoup plus attractif, et ouvert à cette forme d'expression artistique. Ainsi, dans un contexte légal, le street art est permis à tous. Le ministère de la Culture en France se permet même sur son site de faire très largement la promotion du street art. Un appel à projets nationaux en 2017 a même été lancé par l'administration pour que les villes de France soient redécorées par l'art urbain. À Marseille, en juillet 2018, un festival est même lancé pour rendre légal le street art sur une portion de la ville, soit les murs de la rocade autoroutière L2. Cette invitation et promotion directe de l'art urbain tend à promouvoir les villes, mais aussi les artistes, et surtout leurs droits futurs, tout en prônant la dépénalisation des arts de rue pour les années à venir.